Pour ne rien vous cacher, j’ai eu un mal de chien à rédiger cet article. Et je voudrais vous expliquer pourquoi je me suis laissé aller à la procrastination — mais aussi comment j’ai réussi, finalement, à écrire ce texte. Aujourd’hui, je change donc d’approche : pour vous parler de la motivation du rédacteur web, je vous raconterai mon expérience personnelle et je laisserai de côté, au moins pour un moment, les conseils et astuces « clés en main » qui abondent à ce sujet sur le net.
Motivation vs Démotivation : voici comment tout a commencé
Au départ, j’avais proposé d’intégrer cet article sur la motivation du rédacteur web dans le planning éditorial du blog FRW pour deux raisons précises.
Tout d’abord, je trouvais que c’était une très bonne idée, car je vois souvent des élèves FRW qui, arrivés en fin de la formation, éprouvent des difficultés à rédiger des articles pour leur portfolio.
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Ensuite, je pensais pouvoir trouver des informations pertinentes dans un livre que j’avais à résumer à la même période pour un autre client.
Autrement dit, je m’imaginais pouvoir faire du « 2 en 1 » (comme le gel douche, oui). En soi, l’initiative n’était pas mauvaise, car en rédaction web comme ailleurs, il est toujours plus efficace de prévoir des travaux similaires au même moment.
Seulement voilà, le planning dudit client changea.
Finalement, je n’aurais pas à résumer ce livre, mais un autre, qui n’avait plus grand-chose à avoir avec la motivation. À l’eau, donc, le bon plan « corps et cheveux ».
Dans ce cas, que faire ?
Quand ChatGPT s’en mêle
Au mois de novembre 2022, le monde de la rédaction web et des geeks a été hanté par une nouvelle. Une intelligence artificielle nommée ChatGPT viendrait, c’est selon :
- prendre le travail des rédacteurs web en le rendant superflu ;
- aider ceux-ci dans certaines tâches ;
- ne rien faire du tout ou presque, tant ses résultats sont médiocres.
Vous qui lisez ces lignes, je suis sûr que vous avez eu votre petit mot à dire sur le sujet — ou, au moins, entendu quelqu’un vous en parler !
Eh bien, c’est exactement ce qu’il m’est arrivé. Non seulement j’entendais le débat s’animer sur le Slack de l’équipe FRW, mais un mardi midi, alors que j’étais tranquillement en train de déjeuner avec mon ex, voici qu’il me demande, ses deux yeux grand ouverts :
« Au fait, tu as déjà essayé ChatGPT ? »
Lui, le professeur d’espagnol, amoureux des technologies, m’annonce qu’il l’utilise de temps en temps pour trouver des idées pour ses cours et ses examens !
Ni une ni deux, nous commençons à nous amuser avec le programme et nous lui demandons de nous raconter l’histoire d’un géant végétarien et d’une fée carnivore. Résultat : un conte fade, sans épices, mais une petite histoire en forme de conte quand même.
Oserais-je vous l’avouer ?
De retour chez moi, j’ai testé ChatGPT sur la requête… « Motivation du rédacteur web ».
Sa première proposition ne m’a pas vraiment satisfait, d’autant plus que le nombre de mots était très limité dans la version test (autour de 300 mots si ma mémoire est bonne).
À plusieurs reprises, je lui ai donc demandé de préciser sa « pensée » en lui demandant d’ajouter des éléments.
Au final, je me suis arrêté à 10 conseils.
Rédacteurs et rédactrices web, voici donc de quoi vous (re)motiver grâce à ChatGPT (je reformule et réorganise légèrement) :
- Définir des objectifs SMART ;
- Avoir des objectifs à long terme ;
- Donner du sens à son activité ;
- Être bien organisé ;
- Varier les tâches :
- S’accorder des récompenses ;
- Développer un réseau professionnel ;
- Se sentir reconnu dans son travail ;
- Continuer à apprendre et diversifier ses compétences ;
- Prendre soin de soi (faire du sport, bien dormir, etc.).
Franchement, le texte ne valait rien : un ton neutre absolument indigeste et truffé de répétitions pour couronner le tout.
Toutefois, la structure pouvait éventuellement convenir. Bien évidemment, il me fallait aussi des sources fiables. Je lui en demande donc.
Et là, horreur.
Après vérification, je vois que les sources sont fausses, purement et simplement inventées par l’IA (merci à Audrey Alloux au passage, qui m’avait bien mis la puce à l’oreille sur ce point quelques jours avant)…
Une longue période de procrastination
Comme j’ai normalement l’habitude de m’y mettre à l’avance, rien n’était pressé à ce moment précis.
J’ai donc laissé de côté une ébauche de plan créée à partir des 10 recommandations de ChatGPT en me promettant d’y revenir dans la semaine.
Quelques jours plus tard, je me remets au travail en pensant que je n’aurai « plus qu’à » trouver des sources et à rédiger à partir de la structure fournie par l’IA.
Pourtant, impossible de m’y mettre. Encéphalogramme plat.
Un manque absolu d’envie d’écrire quoi que ce soit s’était emparé de moi. J’ai pourtant essayé mes techniques habituelles en cas de stress ou de manque de motivation :
- repartir à la recherche de sources intéressantes ;
- rédiger lentement et tranquillement en coupant l’article en petits morceaux ;
- prendre un peu de recul, imprimer le texte, puis revenir dessus.
Je m’y suis repris à trois fois, et trois fois j’ai échoué.
Au petit matin, le jour de la remise de l’article
Cela m’amène à une autre confession.
À force de penser que j’avais le temps, j’ai fini par me mettre dangereusement en retard pour rédiger cet article, au point d’arriver le jour J de la remise avec un brouillon dont je n’étais pas trop fier.
Imaginez-vous la scène suivante.
Il est 6 h 30 du matin. Impossible de dormir au-delà, à cause du stress engendré par la tâche et d’un pépin de santé la veille.
Une petite heure plus tard, quelque peu paniqué et mal en point, je me vois contraint de demander un délai à Stéphanie, éditrice du blog FRW. Croyez-moi, je suis dans mes petits souliers. Mais elle accepte et — surtout — elle me rassure.
Désormais, il m’est impossible d’attendre plus longtemps.
Je me mets en devoir de rédiger cet article dans la journée ! L’angoisse créée par le retard va-t-elle agir comme un révélateur ? En partie, oui… mais seulement progressivement, comme vous allez le voir.
Les clés de la remise en action d’un rédacteur web fatigué
À l’aube, je prends conscience d’une chose capitale. Il me faut changer d’angle, trouver une autre manière d’aborder le sujet.
Mais comment parler de façon originale de la motivation du rédacteur web sans retomber dans le format « X conseils » ?
Dans un premier temps, je me tourne vers mes premiers amours… la philosophie. 7 h du matin bien entamé, café en main, je pars à la recherche de références intellectuelles utiles sur la motivation.
Mais rien ne me convainc. Deux heures de plus passent avant de comprendre à nouveau que je ne veux pas disserter sur Spinoza ou Aristote ; tout cela me semble trop abstrait pour un article de ce type. J’efface donc successivement deux autres brouillons…
Et me revoilà au point mort. Pour tout vous dire, à cet instant précis, je suis dépité.
Il me faut un break.
Malgré l’urgence, je décide d’aller déposer un paquet (des livres à rendre, tiens) dans un magasin relais. Je m’anime. Sortir me fera du bien.
Fip, ma radio de toujours, passe un morceau des Daft Punk que j’adore (Giorgio by Moroder). Pendant que je m’habille, je sens que je reprends vie ; il est 9 h 30, Nico s’éveille.
Or, voici ce à quoi je pense ensuite : une fois mon paquet livré, j’irai m’installer dans un bar et je ne bougerai pas de là avant d’avoir trouvé la clé du problème.
Mieux : si je parviens à écrire un premier jet satisfaisant, je m’offrirai cette lampe en solde que j’ai vue dans cette boutique pas très loin.
Et là, Eureka !
Je suis à peine en train de fermer la porte de mon appartement que l’angle par lequel je veux traiter la question m’apparaît : puisque j’ai eu tant de mal à m’y mettre, je proposerai un article sur ma propre expérience… Ainsi, la boucle sera bouclée !
Heureux, je sors de chez moi, me dirige vers le point relais avec entrain puis, le colis déposé, je cours m’installer dans un petit établissement sympa du Soho (à Malaga, pas à Londres).
Il était une fois un digital nomad dans un bar
Alors que je rédige ces lignes, je suis dans un bar nommé le Pic-Nic avec un cookie, un café solo et un verre d’eau.
Je suis satisfait. Je suis là où j’ai envie d’être, avec une tâche à accomplir qui me plaît. Cette simple pensée me donne un surplus d’énergie.
Enfin, j’écris…
Et l’histoire que vous venez de lire sort presque d’elle-même, sans difficulté majeure.
Post-scriptum. Ce que j’ai rédigé dans ce bar du Soho entre 10 h et 12 h environ n’était, en fait, que la première version du texte que vous avez sous les yeux, ce brouillon qu’Ann Handley nomme l’« Épouvantable premier jet » dans son Guide des écrits web percutants. Je l’ai bien sûr repris ensuite, je lui ai ajouté quelques sources et je l’ai corrigé.
La motivation du rédacteur web est-elle soluble dans le café ?
Probablement pas, mais ma concentration, c’est certain ! Ce café est trop fort ; il me donne le cœur qui pompe (où serait-ce le cookie trop gras et trop sucré ?). Bref, après un peu moins de deux heures de rédaction, je m’épuise et il est temps de conclure.
Regardons donc en premier lieu ce qui s’est mal passé.
Oui, comment l’enthousiasme initial pour la rédaction de cet article s’est-il évaporé ?
Si je fais le point, je vois d’abord que la démotivation est venue du sentiment d’avoir à agir « sous les ordres » d’une machine et de devoir répéter le même contenu qu’une foule de sites internet.
Plus je fouillais sur le web et plus je repérais en effet des conseils identiques à ceux fournis par ChatGPT (ce qui n’est pas très étonnant, puisque c’est là qu’il les trouve), le tout refourgué ad nauseam de façon fort peu originale.
En fait, en suivant docilement les recommandations de l’IA, j’avais l’impression de perdre à la fois ma créativité et mon esprit critique.
Lorsque je m’observe, je remarque aussi que cette frustration a engendré une forme de procrastination m’ayant conduit à une situation problématique, puisque je ne suis pas parvenu à livrer l’article dans le temps imparti.
J’ai donc commis deux erreurs au moins.
- Croire qu’un outil allait me donner « la » solution et me simplifier la vie au point que je n’aurais « presque » plus rien à faire.
- Tergiverser tellement que j’en ai été amené à demander un délai.
La voie retrouvée de l’enthousiasme à écrire pour le web
Et pourtant, j’y suis quand même arrivé. Oui, la confiance et la motivation se sont à nouveau emparées de moi.
Comment ?
- J’ai pris clairement conscience de ce que je ne voulais pas faire.
- J’ai réfléchi à ce que je pourrais faire et à l’angle à adopter.
- J’ai pris l’air et j’ai changé d’environnement.
- Je me suis donné un objectif clair et précis.
- Je me suis proposé une récompense.
- Je me suis mis en phase avec une image de moi qui me plaît (le nomad digital).
- J’ai redonné du sens à mon métier en cherchant avant tout à écrire un article de qualité et utile.
- J’ai rédigé un premier jet tant que j’avais l’inspiration, puis j’ai repris progressivement tous les éléments que j’avais lus pour les incorporer naturellement dans l’article.
- J’ai pris plaisir à la rédaction de l’article et j’ai profité de cette crise pour « innover » (tout est relatif, mais disons que c’est la première fois que j’utilise ce format « dans les coulisses »).
- Enfin, last but not least, j’ai eu la chance de bénéficier d’un milieu de travail sain et du soutien d’une « collègue cliente » (comment la nommer autrement) qui m’a rassuré et m’a autorisé à faire une erreur.
Suis-je revenu à mon point initial ? Dans un sens, oui, puisqu’une partie des conseils que vous venez de lire concordent avec ceux trouvés sur le net. Mais ce qui change, c’est qu’ils ont désormais pris vie autour d’un exemple concret : le mien.
Remerciements
Je voudrais remercier Lucie de m’offrir la possibilité de rédiger de chez moi (ou depuis le Pic-Nic café), ainsi que Stéphanie, pour sa sympathie et sa disponibilité — et je parle non seulement pour le délai octroyé cette fois, mais pour tout le travail réalisé ensemble depuis plusieurs mois. Enfin, merci à vous, lectrices et lecteurs, de m’avoir lu jusqu’ici. J’espère sincèrement que cette petite histoire vraie vous aidera à reprendre confiance et motivation dans les moments de doute !
Quoi, vous ne faites pas encore partie de la communauté FRW ? Consultez notre offre de formation en rédaction web, en copywriting éthique et en social media management.
À bientôt !
Nicolas Delforge, ancien élève Origami 5 et coach FRW.
17 Responses
On est d’accord que tu l’as fait exprès le « je suis dans mes petits souliers » ? 😀 Finalement ça valait le coup, il est sympa ce texte Nicolas !
Même pas 😅 ! Mais Stéphanie me l’a signalé lors de la relecture et nous avons décidé de le garder ;). Merci pour ton message, ravi que le texte t’ait plu.
Merci pour cet excellent article, plaisant à lire en plus de m’avoir été très utile. J’étais dans cette phase de doute et de procrastination hier, et je me retrouve pleinement dans ces mots ! Je retiens plusieurs choses précieuses, notamment d’oser prendre l’air, plutôt que de tourner en rond autour de son bureau ! Merci Nicolas 🙂
Un grand merci pour ce commentaire ! Oh oui, je crois que se mettre en mouvement quand on est collé inutilement à son bureau depuis 2 heures est vraiment la meilleure chose que l’on puisse faire 🚶🏼☀️.
Super intéressant on a l’impression de te suivre « en vrai » toute la journée.
Je retiens : prendre l’air, aller marcher, s’octroyer une petite récompense et ne pas suivre une IA si on n’en est pas convaincu.
Merci Nicolas 😉
Merci pour ton commentaire, Audrey ! Je suis content que le style et l’angle de l’article t’aient plu. Comme quoi, ça valait le coup d’oser :).
Je te souhaite beaucoup de succès dans tes nouvelles aventures web !
J’aime beaucoup ce partage « dans les coulisses » et les réflexions en filigrane de cet article ! 🙂 Ravie de lire que notre nouvel outil n’est pas si puissant qu’on dit. Merci d’aborder le sujet de l’esprit critique (quel enjeu) et de la créativité.
Merci d’avoir pris le temps de partager ton sentiment 😊. Je suis content que ce nouveau format t’ait plu. Comme quoi, il y a toujours quelque chose à faire, même quand la situation semble mal embarquée !
Super cet article Nicolas ! En effet, ce n’est pas toujours facile cette histoire de motivation, même le nerd de la guerre comme on dit 🙂
Merci pour ce partage d’expérience.
Salut Constance ! Merci pour ce commentaire :). C’est vrai que quand on travaille seul et en tant que freelance, c’est souvent un élément central dans l’équation 😜. Heureusement qu’il existe des astuces pour retrouver la forme !
Le « nerf » de la guerre, pardon pour la faute d’orthographe…
Merci pour l’authenticité de ton article Nicolas ! J’ai aussi testé ChatGPT pour voir ce qu’il pourrait me proposer. Et je suis d’accord avec toi. La créativité est vraiment limitée après. Alors c’est toujours mieux de partir sur ce qu’il y a dans notre tête. Les idées sont plus fluides et plus originales. Et la motivation revient assez vite 🙂
Je te remercie pour ce message Irina. Oui, le cerveau d’abord, l’IA ensuite ! Pour l’instant, c’est encore mon crédo, et je pense que ça le restera encore un moment 🧠😉.
Merci Nicolas pour cet article passionnant que j’ai dévoré du début à la fin. De mon côté, la procrastination survient quand je me mets trop de pression sur un article : ça me décourage et je perds bcp de temps à me remobiliser… Je vais suivre tes conseils avisés la prochaine fois 😉
Salut Linda, merci pour ton partage 🤗. Je connais bien le processus que tu décris. Heureusement, la relativisation (« au fond, il y a bien plus grave et je ne devrais pas lui/me donner tant d’importance ») et la prise de confiance (« je peux le faire, car j’ai déjà fait des choses semblables ») peuvent aussi aider !
J’adore l’idée de s’offrir une récompense 😉 Bravo coach pour cet article !
Merci d’avoir pris le temps de laisser un mot, Élise :-). Finalement, je ne l’ai pas achetée ce jour-là (la lampe 😄), mais la simple idée de se faire plaisir après avoir bien travaillé a été suffisante. Et c’est quelque chose que je fais de plus en plus : ne plus planifier de longues journées entières de travail, mais privilégier les bons créneaux et commencer à travailler en ayant clairement à l’esprit l’idée qu’à la fin des heures de boulot, je prendrai du temps pour moi.