Écriture et émotions, quand les mots nous touchent… ou pas

C’est dimanche. Il y a quelques minutes à peine, je démontais mon lave-vaisselle pour tenter de nettoyer la pompe de vidange et je tombais sur un vieux nid de souris… le tout en musique. Quel rapport me direz-vous ? Eh bien, cela m’a permis de prendre le temps de réfléchir à la puissance des mots et à l’émotion qu’ils peuvent dégager (c’est lamentable de réaliser à quel point je n’ai jamais le temps de « penser » à ça). J’ai toujours été très sensible à la musique et aux paroles des chansons. Je fais partie de ces gens qui n’écoutent pas pour le simple plaisir d’écouter, qui écoutent, car ils s’identifient aux mots, aux phrases, au sens plus ou moins caché. Vous savez, quand une chanson vous donne des frissons ou rend vos yeux humides. Quand elle vous fait vibrer au point d’avoir l’impression qu’elle sort de vos tripes. Là, j’écoutais Je disparais dans tes bras de Christine and the Queens, et je me disais que j’aurais pu écrire cette chanson (si j’avais son talent) tant elle colle à mon histoire personnelle. Pourtant, je suis persuadée qu’elle n’évoque rien à la plupart des gens.

J’en suis venue à me demander comment ces textes qui nous parlent sont construits. J’ai réfléchi au web et à ses mots. Tellement de mots ! Est-il possible de reprendre les techniques des artistes pour toucher les lecteurs, sans contenu explicite ? Peut-on générer des émotions avec des mots écrits sur un écran ? Les techniques de copywriting et recherches de persona sont-elles vraiment efficaces ? Enfin, peut-on vraiment manipuler les lecteurs avec des mots ? Je partage mes réflexions avec vous.

Permettre à l’Autre de se reconnaître dans des mots qui ne sont pas les siens

Nous sommes tous d’accord pour dire que les poètes sont les spécialistes du genre, avec leurs mots, ils nous emportent dans leur univers (ou le nôtre) et créent des émotions intenses. Les paroliers et les écrivains sont désormais les poètes d’aujourd’hui. Mais ils ne sont pas les seuls. Les hommes politiques ne laissent rien au hasard, ils travaillent leurs textes, pèsent chaque mot et, parfois, laissent traîner des phrases qui deviendront des citations pour la postérité. Nous connaissons tous des phrases célèbres de Mandela ou Gandhi auxquelles nous pouvons nous identifier, sur lesquelles nous pouvons méditer.

Voyez plutôt :

Il n’est pas nécessaire d’éteindre la lumière de l’autre pour que brille la nôtre.

Gandhi

Être libre, ce n’est pas seulement se débarrasser de ses chaînes ; c’est vivre d’une façon qui respecte et renforce la liberté des autres.

Mandela

Certaines citations entendues, écoutées et appliquées dans une philosophie de vie peuvent s’avérer bien plus puissantes que des livres entiers de développement personnel, comme la célèbre :

Je ne perds jamais, soit je gagne, soit j’apprends.

Mandela

À une échelle beaucoup plus modeste, le rédacteur web doit se mettre à la place du lecteur, il doit l’aider à se reconnaître dans ce qui est écrit. Il doit l’entraîner, le captiver pour le garder sur la page, lui donner envie de revenir ou de naviguer sur le site.

S’il est aussi copywriter, il va guider l’internaute vers une page de vente, laquelle demeurera l’ultime arme de séduction.

Enfin, le rédacteur web peut aussi avoir un rôle de messager, il va transmettre les idées et les valeurs de son client à l’écrit.

Mots puissants ou phrases vagues ?

Je considère les citations comme des phrases puissantes dans la mesure où elles génèrent une émotion voire une remise en question à leur seule lecture, mais il existe d’autres types d’écrits qui permettent de s’identifier. Je parlerais donc ici des « phrases vagues » et des « textes qui parlent à tout le monde ». Personnellement, j’ai toujours été fascinée par la dextérité des rédacteurs « astro ». Imaginons qu’il s’agisse de votre horoscope du mois, le texte qui suit vous parle-t-il ?

Après avoir traversé et supporté un épisode délicat, vous espérez sans doute un mois de juillet rêvé. Désolé de vous contrarier, en vous disant que les planètes en Gémeaux ne vous facilitent pas la tâche. Sur le plan relationnel en particulier. La communication a du mal à passer. Pour cause d’incompréhension ou d’incompatibilité. S’il est difficile de dialoguer, peut-être est-il préférable d’agir ensemble ? Si ce n’est main dans la main, du moins avec un objectif commun.

Alors ?

Personnellement, il pourrait tout à fait coller avec mon mois de juillet (je suis balance), il s’agit pourtant de l’horoscope des poissons de mai dernier.

Vous voyez où je veux en venir ?

Certains textes sont si vagues ou applicables à chacun de nous (nous traversons tous des périodes de doute et nous avons à peu près tous des problèmes de communication dans notre vie pro ou perso !) qu’ils en deviennent « passe partout ».

Où le rédacteur doit-il se situer là-dedans ? Ma réponse restera vague elle aussi, je pense que le rédacteur doit trouver sa propre voie et surtout être adaptable et à l’aise dans ce qu’il fait. Essayer d’écrire pour tout le monde n’est pas une chose facile, il est généralement plus simple de penser à un persona, mais c’est un vrai exercice de style que de rédiger de manière à ce que chacun se reconnaisse.

Écrire pour manipuler, c’est sain ?

Il y a plusieurs types de manipulations. Quelqu’un qui rédige une page de vente pour vendre du rêve et inciter à l’achat, quel que soit le besoin du prospect, est un charlatan. Mais n’écrivons-nous pas tous pour manipuler finalement ?

Lorsque j’écris dans mon journal, je le fais pour moi dans un premier temps, mais également parce que je me dis qu’il sera peut-être lu par mes filles lorsque je ne serai plus de ce monde. Est-ce que je les manipule lorsque je partage mes pensées du moment ? Oui, d’une certaine manière, car elles auront forcément un avis sur une situation qui sera finalement retranscrite de façon très subjective. C’est exactement la même chose avec les mots doux que nous laissons à notre amoureux, on espère qu’il pensera à nous en le lisant, que cela lui procurera une émotion positive et plaisante. Bref, nous manipulons tous les émotions avec quelques mots bien choisis. Est-ce malsain ? Je ne pense pas, du moment que l’intention est bonne.

Où placer le curseur et quel angle choisir quand on est rédacteur web ?

À votre avis, le rédacteur doit-il tenter de générer de l’émotion lorsqu’il écrit une fiche descriptive de produit ? Eh bien oui, s’il s’agit d’un petit texte copywrité, non s’il crée plutôt une fiche technique et détaillée.

Il en va de même avec une page à propos. Bien entendu, le rédacteur web peut conseiller son client, lui suggérer d’utiliser le storytelling, d’optimiser sa page pour le référencement naturel, mais le commanditaire restera ROI (tout comme le contenu ????).

Il existe autant de profils de rédacteurs que d’être humains… Nous pouvons bien sûr faire quelques généralités, mais globalement, quand certains vont s’épanouir dans le respect de briefings stricts (car cela les rassure), d’autres vont préférer viser les clients qui laissent libre cours à leur imagination et leur créativité. Lorsque j’écrivais pour les autres, j’étais plutôt de ceux-là : je fuyais les briefings compliqués, je démarchais les clients audacieux qui avaient confiance en moi. C’est une question de personnalité !

À ce propos, j’en profite pour partager avec vous deux tests très intéressants lorsqu’on est freelance : le DISC et le MBTI. Vous pourrez passer le test (gratuitement et sans aucun engagement) du MBTI ici : Connaître mon profil MBTI. Pour le DISC, je vous laisse faire vos propres recherches, car je ne connais pas bien les sites proposés.

Les techniques de copywriting et de recherche de persona sont-elles vraiment efficaces ?

Pour rappel, le copywriting est « l’art » de guider un prospect vers un produit qu’on veut lui vendre, de façon plus ou moins discrète. La recherche de persona est l’étude d’une audience qui va permettre de s’adresser aux bonnes personnes.

⏩ À découvrir aussi : le témoignage d’Emma, une copywriter spécialisée dans l’affiliation

Je n’ai aucun doute sur l’efficacité des techniques de copywriting et d’étude de persona, en revanche, je pense sincèrement que l’effet « téléphone arabe » du web (dont je parle dans cet article) a généré une sur-vulgarisation du copywriting et de la définition d’un persona. La francophonie ayant peu de sources sur le sujet, les quelques articles y faisant référence ont été exploités et essorés jusqu’à la dernière goutte, créant des clones bas de gamme partagés et repartagés sur les réseaux sociaux.

Qu’en est-il aujourd’hui de la prise en compte de la psychologie humaine et de l’utilisation des mots, des émotions ? Lorsque je surfe rapidement sur le web, que je frôle de mon pouce un fil Instagram, je me désole. Je lève les sourcils, écarquille les yeux, et puis je souffle. Et puis je me trouve bien prétentieuse de réagir comme ça. Je m’en veux. Alors je clique sur des cœurs, parce que je me dis que finalement, c’est peut-être aussi ça la vie : la simplicité.

Pour toutes ces raisons, je préfère me réfugier dans la musique, les bons films d’auteurs et la lecture, il n’y a finalement pas de meilleure nourriture intellectuelle que celle qui provient de la source. C’est mon côté bobo.

Bonne rédac’,

Lucie Rondelet

lucie rondelet instagram

Partager l'article

Une réponse

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Lancez-vous !

error: Content is protected !!