Lucie Rondelet interdit l'utilisation de l'IA à son équipe de rédaction web

Pourquoi j’interdis l’IA pour la rédaction d’articles au sein de mon équipe ?

Il ne s’agit pas d’un énième titre putaclic, mais bien d’une décision mûrement réfléchie : j’interdis désormais l’utilisation de l’IA générative dans la rédaction des articles de blog, que ce soit pour mon média Celles qui Osent, ou pour le site sur lequel vous lisez certainement ces lignes : Formation Rédaction Web.

Oui, je sais, je suis l’autrice du Guide de l’écriture assistée par l’intelligence artificielle et je propose aussi une formation au pilotage de l’IA en plus de la rédaction web, mais cette décision n’est pas incompatible avec mes choix. J’utilise l’IA au quotidien pour certaines tâches, notamment pour brainstormer, mais je ne souhaite plus l’utiliser pour générer du texte à destination de mes lecteurs et lectrices.

Rédiger des articles de blog prend beaucoup de temps

Je ne vous apprends rien, la rédaction web prend énormément de temps et pour cause : il faut réfléchir à un angle, à des parties, des sous-parties, au vocabulaire utilisé, au ton et bien sûr, aux sources que l’on va utiliser pour apporter un maximum de valeur à notre article. L’idée est de systématiquement penser à ce que l’on apporte et c’est d’autant plus important aujourd’hui, à l’heure où l’IA peut répondre à la majorité de nos questions, sans que l’on ait à visiter un site web pour obtenir une réponse.

Bref : écrire prend du temps, et ce temps, je pensais ne pas pouvoir le trouver. J’ai donc voulu continuer à déléguer la plupart des articles publiés sur mes blogs. Autrefois, j’engageais d’anciens élèves qui rédigeaient en fonction de leurs connaissances et de ce que je leur demandais ; ils rédigeaient sans l’aide de l’IA, puisqu’elle n’était pas aussi démocratisée qu’aujourd’hui.

Plus récemment et après avoir lu des statistiques sur l’importance de publier au minimum 3 fois par semaine pour augmenter son trafic (satistiques Orbit Media), j’ai eu la riche idée d’autoriser l’utilisation de l’IA générative à mes rédactrices. Je leur ai demandé de s’en servir pour la recherche de sources, de vérifier ces sources et d’essayer de gagner un maximum de temps avec une rédaction bien pilotée. Je me suis ensuite penchée sur les articles qui m’ont été remis et là, catastrophe. L’IA avait proposé des raccourcis grossiers, le vocabulaire n’était pas suffisamment étayé et certaines informations n’étaient carrément pas crédibles.

J’ai donc demandé des retouches à mes rédactrices, puis, à force d’allers-retours et de temps perdu, je me suis dit qu’il était urgent de publier pour ne pas laisser mon blog en chantier.

Finalement, le fait de vouloir économiser m’a fait perdre énormément de temps en consignes, en allers-retours, et en attente de retour des rédactrices, qui, évidemment, n’étaient pas à ma disposition pour corriger les articles dans l’heure.

Et j’en profite pour rappeler quelque chose d’important quand on est commanditaire : c’est que l’on n’ose parfois pas retoucher les textes nous-mêmes, de peur que les corrections ne passent à la trappe et que les consignes ne soient pas bien intégrées pour les fois suivantes.

Je donne un exemple : si l’un de mes retours est « attention, il faut utiliser les guillemets français, pas les américains », on pourrait se dire « oui mais cocotte, tu irais plus vite en faisant la modification toi-même ». Certes. Mais si on ne souligne pas ce qui ne va pas, la rédactrice peut faire l’erreur indéfiniment.

Re bref : rédiger prend beaucoup de temps, et tenter de piloter l’IA quand on a une expertise qui va au-delà de la plupart des textes que l’on trouve en ligne peut être encore plus chronophage.

Alors vous allez peut-être me dire « oui, mais Lucie, tes rédactrices n’auraient peut-être pas fait du meilleur boulot sans utiliser l’IA ! ». Eh bien figurez-vous que si, et j’en ai la preuve.

Quand j’ai interdit l’IA générative pour la rédaction

Déçue par l’expérience de co-rédaction avec l’IA, j’ai donc demandé à mes rédactrices de ne plus du tout l’utiliser. Ni pour la recherche de sources, ni pour la rédaction. D’ailleurs, je n’aime pas parler de « rédaction » à propos de l’IA. L’IA génère du texte, elle ne rédige pas. Elle produit des enchaînement de caractères, lesquels composent des mots, à partir de statistiques et de probabilités, mais elle n’écrit pas et ne rédige rien.

Le résultat a été à la hauteur de mes espérances ! Les rédactrices se sont creusées les méninges pour réfléchir à quelque chose de concret, de valeur, le tout assaisonné de leur expérience personnelle. Ouf. Je précise aussi que les textes faisaient sens, puisqu’il suivait une logique humaine, qui leur était propre.

Je vous explique.

Imaginez un instant que vous soyez amené•e à écrire un texte sur le choix d’une assurance vie alors que vous n’y connaissez rien. Si vous faites appel à l’IA générative pour la recherche de sources et la rédaction (ne serait-ce que du plan), alors, vous allez vous retrouver avec une structure « digne de ChatGPT », c’est-à-dire, dans la plupart des cas, un condensé des meilleurs résultats proposés sur Google. En d’autres termes, vous ne verrez que les assurances les plus populaires et ChatGPT ne fera pas attention aux offres obsolètes, aux tarifs actualisés… Il ne prendra pas non plus en compte l’actualité économique, ni les valeurs et besoins du commanditaire (sauf si on les lui précise).

Vous, humain•e, en revanche, pourrez aller chercher des résultats non sponsorisés, comparer les différentes offres, prendre le temps de vous interroger, en faisant preuve de bon sens, sur les conseils que vous pourriez donner à vos lecteurs, en fonction de l’angle de votre commanditaire.

Résultat : vous réaliserez que votre structure et votre texte sont finalement bien éloignés de ceux proposés par ChatGPT et surtout, qu’ils apportent beaucoup plus de valeur et de profondeur. Cerise sur le gâteau, vous aurez appris énormément de choses et cela vous donnera certainement des idées de nouveaux articles pour le planning éditorial de votre client. 

Avouons-le, c’est quand même beaucoup plus agréable de se sentir utile et de ne pas se laisser aller à la paresse intellectuelle et ça, c’est un aspect très important dans le métier de rédacteur ou rédactrice web.

Quoi qu’il en soit, je pense que c’est pour cette raison que les textes étaient bien meilleurs sans IA. J’ai aussi remarqué que l’IA peut nous faire perdre confiance en nous, on se dit « l’IA va mieux tourner telle phrase », « l’IA va penser à telle chose, alors que je n’avais pas eu l’idée ». Peut-être ! Mais n’est-ce pas tout aussi important, voire plus, de laisser quelques aspérités, quelques tournures un peu bancales, sans perfection, dans nos textes ? Personnellement, je préfère lire des textes imparfaits !

Si vous avez peur de ne pas avoir tout dit, alors, brainstormez avec l’IA avant de valider votre texte en lui demandant si vous n’avez rien oublié : je vous assure qu’elle aura toujours des remarques à vous faire. Pour le reste, soyez décomplexé•e : l’écriture « parfaite » est tout aussi ennuyeuse que les voix artificielles que l’on entend parfois sur Youtube !

Pourquoi je recommande de limiter l’utilisation de l’IA générative dans la production de contenu écrit ?

Le contenu web est en train de vivre un tournant historique et une scission assez nette se dessine. Il existe d’un côté les entreprises qui veulent faire des économies et qui délèguent leurs contenus aux IA (sur leur site, leurs réseaux sociaux, leur communication globale) et de l’autre, celles qui misent sur la qualité et l’authenticité.

De mon point de vue, remplir un site avec du contenu généré par des IA est suicidaire sur le long terme, puisque l’IA donnera exactement les mêmes informations que celles partagées sur ses pages…

Si je publie des articles rédigés ou inspirés par les IA génératives, alors, mon contenu n’aura plus aucune valeur. Les internautes et mobinautes préfèreront poser une question à ChatGPT ou Gemini plutôt que de s’embêter à aller lire mes textes. Si, en revanche, je prends le temps d’écrire des textes avec mes petits doigts, sur un joli clavier, alors, le résultat ne sera pas du tout le même et mon contenu sera totalement unique.

La rédaction web en 2025 devient une expérience à part entière, un travail de communication et d’information absolument nécessaire pour les années à venir.

À l’heure où j’écris ces lignes, je sais que de nombreux médias se plaignent de la qualité médiocre qu’ils commandent à des agences de création de contenu. Mon seul conseil (si je peux me permettre) serait d’arrêter de se tirer une balle dans le pied en voulant faire des économies sur ce qui est à l’origine de leur modèle économique : une écriture de qualité. Sacrifier la qualité du contenu, c’est entamer une descente qui peut se révéler fatale sur le long terme. Quand un magazine payant commence à publier du contenu rédigé par des IA, cela revient à servir des boîtes de conserve pour faire des économies dans un restau gastro. Le jour où il y a beaucoup plus de boîtes de conserve que de produits frais dans les cuisines, alors, le restaurant peut envisager la fermeture.
Les lecteurs ne sont pas dupes. À l’heure actuelle, certains sites tiennent le coup grâce à leur historique (des milliers d’articles publiés par des humains), mais le jour où ceux générés par des IA seront majoritaires, alors, je ne donnerai pas cher de leur avenir.

J’ai fait mon choix !

Cela me prendra du temps, je devrais réfléchir chaque semaine, ce qui n’est pas plus mal, et puis, n’est-ce pas la base de toute communication finalement ?

Bonne rédac’

Lucie Rondelet

lucie rondelet instagram

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